Le Corpus étudié se compose de cinq sonnets dont les auteurs et les époques divergent. Le Texte E, « Art poétique » écrit par Nicolas Boileau pour fixer les règles du sonnet, nous servira de référence pour identifier comment les quatre autres auteurs ont traité ce genre poétique, à travers les siècles, et nous chercherons à identifier l’effet produit. Au XVIème siècle, du Bellay dans ce poème extrait des Regrets respecte scrupuleusement les contraintes du sonnet, si l'on exclut la répétition des mots "Fortune" et « Muses ». Les thèmes abordés (jeunesse perdue, fuite du temps), le ton lyrique ("las », « mille maux et regrets qui m'ennuient »), la construction (deux quatrains/ deux tercets) et l’usage de l’alexandrin amplifiant la musicalité lyrique du lexique utilisé ; font de ce poème un sonnet "parfaitement conforme" aux règles définies par Boileau. Dans sa forme, le poème extrait des Amours jaunes écrit par Tristan Corbière au XIXème siècle obéit aux règles du sonnet : métaphores classiques « Tenons Pégase raide », formules lyriques « Ô », deux quatrains suivis de deux tercets, usage de l’alexandrin. Cependant, le poète détourne le genre du sonnet par l’emploi d’associations inhabituelles (télégramme/ sacré), d’anglicisme inattendu, de vers impairs, et l’utilisation de tirets. Le ton est peu soutenu : "ça peut dormir debout, vite à mon aide, ô délire". Corbières prend ses distances avec humour des règles classiques rendant le sonnet plus accessible et moins emphatique. A la même époque Jules Laforgue dans La Cigarette, poème édité dans Le sanglot de la terre lui aussi respecte la forme classique du sonnet: emploi de l’alexandrin, deux quatrains suivi de deux tercets, reprise de la rime. Il préserve ainsi la musicalité et le rythme. Cependant, la fantaisie du vocabulaire : tantôt lyrique ("résigné, sans espoir, à mon sort, en attendant la mort »), tantôt surprenant (« éléphants », « moustiques ») et tantôt humoristique ("sornettes, cigarettes, pauvres futurs