Charles Bovary à sa mère, Madame Bovary.
A Rouen le 17 Octobre 1857.

Ma chère mère je vous écris pour vous conter ma première journée de classe. Je ne puis vous cacher que ma nouvelle école s’est imposée à moi comme un lieu austère et étranger et que cette journée me laissa un goût amer. Tout débuta lors de mon entrée dans la classe je n’osais me montrer aux élèves et restais en retrait, ce fut surement là ma première erreur. En prenant place dans la classe j’ai senti les regards moqueurs et malveillants des autres élèves me déshabiller, je fus empli d’un sentiment de gêne et de pudeur. On commença par la récitation des leçons, je les écoutais de toutes mes oreilles, attentif comme au sermon. Je ne savais quelle tenue devais-je adopter et je n’osais pas croiser les cuisses ni même m’appuyer sur mes coudes. Je m’efforçais d’avoir une attitude exemplaire mais je tombais vite dans la monotonie du cours. Mon esprit divagua jusqu’à vous, à tel point que le maître d’étude fut obligé de m’avertir pour que je rejoignis les autres dans les rangs. Pendant la récréation personne ne me porta la moindre attention et je du rester seul dans un coin de la cour. Ma deuxième erreur, surement la plus fatale, fut au moment d’entrer dans la classe. Les élèves devant moi jetèrent tous leurs casquettes par terre en faisant beaucoup de poussière. Ne voulant pas me faire remarquer par le professeur lors de mon premier jour je n’osai pas me soumettre à cette manœuvre et gardais ma casquette sur mes deux genoux. Ma casquette était celle que père m’avait acheté, je connais l’aversion que vous lui portez mais c’est le seul présent que j’ai reçu de lui et en la portant je me sentais plus fort pour affronter cette journée. Malheureusement cette casquette fit de moi la risée de toute la classe, la prière terminée le professeur ordonna que nous nous levions et c’est à ce moment là que ma casquette tomba. Cela provoqua l’hilarité de toute la classe, les élèves hurlaient, criaient et