Une société peut-elle se passer d’artistes ?
I. On peut comme Bergson dire qu’une société, c’est « la mise en commun des énergies individuelles », une organisation qui permet de « bénéficier des efforts de tous » et de « rendre à tous leur effort plus facile ». Dans ce cas, une société est fondée sur le besoin et sur la mutualisation des moyens, des savoir-faire. C’est aussi ce que soutenait Platon avec la division naturelle du travail et la société comme coordination de talents pour une production de meilleure qualité et plus efficace. Dans ce cas, les artistes qui produisent des œuvres qui ne sont vouées qu’à être contemplées et qui ne sont ni des objets d’usage ( artisanat), ni des objets de consommation (industrie) n’apportent rien à la société, encore moins à une société industrielle de consommation à la recherche du profit. On peut même considérer que les artistes sont en quelque sorte des parasites, ils profitent des avantages de la société mais ne donnent rien en retour. On peut aussi considérer qu’ils sont un danger pour la société dans le sens où ils donnent le mauvais exemple en n’ayant pas le souci du bien commun, mais uniquement le désir de se réaliser, de créer pour créer pour affirmer et forger leur individualité. Un développement de l’individualité qui menace la société qui présuppose uniformité et donc une négation de l’individuel. Enfin, l’artiste ayant comme le dit aussi Bergson la capacité de lever le voile et de rompre avec la vision utilitaire et conventionnelle de la réalité, peut être à l’origine d’un regard critique sur la société qui l’a encore pourrait menacer sa subsistance. Donc si on pense la société contre l’individu en quelque sorte et fondé uniquement sur le besoin, l’art n’a pas sa place [même si la société peut utiliser l’art pour fonder son identité, se glorifier ou même asseoir sa domination (propagande) ou laisser être l’art comme divertissement, comme expression sublimée des désirs et aspirations refoulées face à la