L’eau au xxie siècle : enjeux, conflits, marché
Pierre-Alain Roche a question des ressources en eau est revenue en l’an 2000 sur le devant de la scène. En s’appuyant sur un important travail de prospective collective, mené sous l’égide du Conseil mondial de l’eau, la « Vision pour l’eau en 2025 », le 2e Forum mondial de l’eau, tenu à La Haye en mars 2000, a été l’occasion d’interpeller les gouvernements sur l’impasse dans laquelle la poursuite des pratiques actuelles pouvait conduire des régions entières du globe. Parmi mille sujets possibles, le Parlement des enfants, en France, a choisi le thème de l’eau pour faire des propositions que le Parlement s’est engagé à étudier. Pas un jour où la presse française n’aborde ce sujet. Peur millénariste relayée par des médias en mal de sensationnel ? Pas si sûr. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’eau, que l’on croit trop souvent suivre un cycle immuable, puisant dans les réserves gigantesques des océans, est une ressource rare et fragile, dont la surexploitation est déjà une réalité, comme l’exemple de la mer d’Aral l’a montré de façon caricaturale. C’est bien sûr la question agricole qui pèse le plus lourdement sur les perspectives de moyen terme. Les limites des ressources en eau exploitables ont d’ores et déjà imposé de substituer à la notion d’autosuffisance alimentaire celle de sécurité alimentaire, et de replacer l’eau et la nourriture au centre des débats diplomatiques régionaux et mondiaux. L’accès à une eau saine à des coûts raisonnables est une condition indispensable de l’amélioration des conditions sanitaires des franges les plus déshéritées de la popu-
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lation mondiale : en avril 2000, l’augmentation du prix de l’eau a déclenché une révolte sanglante dans la ville de Cochabamba, dans la cordillère orientale bolivienne, illustrant dramatiquement le débat sur les conditions du partenariat public-privé pour financer les infrastructures indispensables aux villes du Tiers-Monde. Après un rapide