Alcool
1Dans l´immense empire des signes étendu par l´activité humaine à l´ensemble du monde connu et imaginé, comment reconnaître les symboles ? Je voudrais insister ici sur leur matérialité, en particulier en ce qui concerne les symboles spatiaux, ou lieux symboliques. Comme tous les signes, les symboles « signifient », c´est-à-dire qu´ils portent le sens qu´un individu ou un groupe leur prêtent. Mais à la différence des autres signes, les symboles sont reconnaissables à une particularité : ce sont des réalités concrètes, des objets ou des actes physiques, dont l´existence factuelle est relativement indépendante des significations qu´on leur donne. Cela différencie les symboles d´autres signes, comme les mots ou même certains objets dont l´existence est entièrement associée à leur fonction de signe.
2Suivant l´idée que je propose de discuter, un mot tel que « pouvoir » n´est pas un symbole, car il n´existe pas sans le pouvoir qui l´informe, même si nous pouvons le matérialiser tout seul sur l´écran d´ordinateur ou la feuille de papier. Il en irait de même pour un panneau de signalisation routière, par exemple ; ainsi, le feu de signalisation tricolore me « signifie » le droit de passer ou le devoir de m´arrêter, mais il ne les symbolise pas : je ne regarde pas le feu tricolore lui-même comme la matérialisation de mes droits et devoirs. En revanche, le policier qui règle la circulation, lui, peut être regardé comme un symbole du pouvoir, tandis que cet ensemble de mots qu´est la Constitution peut être considéré comme un symbole de mes droits et devoirs : les deux existent au-delà de ce qu´ils signifient strictement.
3Bien sûr, au vu de tout ce dont s´est chargé le mot au long de l´histoire des civilisations occidentales jusqu´à nos jours, le maniement du concept de symbole est délicat. Mais il est possible de récupérer cet héritage culturel tout en utilisant une définition simple et opératoire: dans la tradition européenne, le symbole est ce qui unit par