Analyser les les effets techniques sur l'emploi
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« La technologie est fréquemment désignée dans le grand public comme une force destructrice d’emplois. Le mouvement ouvrier a une longue tradition de lutte contre la machine. Au début du XIXème siècle, les luddites en Grande-Bretagne et les canuts en France détruisaient les métiers à tisser mécaniques que les patrons de l’industrie textile voulaient installer pour les remplacer. Les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix ont vu se multiplier les suppressions de postes et les compressions d’emploi, dans les industries sidérurgique ou automobile par exemple, du fait de la modernisation. Dans le contexte de chômage élevé en Europe dans les années quatre-vingt-dix, certains auteurs ont annoncé la « fin du travail», lequel serait progressivement rendu inutile à la production par l’efficience toujours plus grande de la technologie.
Le fondement économique de cette thèse est la «théorie technologique du chômage ». Pour un niveau donné de la production, une augmentation de la productivité telle que l’engendre le progrès technique réduit l’emploi disponible.
Certains économistes ont proposé un raisonnement plus sophistiqué. L’innovation de procédé (ou innovation technique), en augmentant la productivité, réduit l’emploi. Mais l’innovation de produit a un effet inverse : les produits nouveaux suscitent une demande nouvelle, qui amène les firmes à accroître leur production et donc à embaucher. Dans ce cadre, les fluctuations du chômage au cours du temps sont vues comme résultant des effets opposés des deux types d’innovations. Les périodes dominées par l’innovation de procédé (comme la période actuelle avec l’informatique et les robots) engendrent mécaniquement le chômage, tandis que celles où domine l’innovation de produit (les « trente glorieuses» avec l’automobile, l’électroménager) engendrent de l’emploi »
Dominique Guellec, Economie de l’innovation, Editions La Découverte, 1999, pp77/78