Le baroque, toi qui goûtes la musique et les arts, tu le sais sans doute, n'est pas à l'origine une notion appliquée au littéraire, mais à l'architecture puis aux arts picturaux et musicaux, et encore, après coup. On doit à quelques critiques de la mi-xxe, inspirés cependant par quelques approches faites en Allemagne et en Angleterre, l'application de cette notion aux œuvres littéraires et plus particulièrement poétiques, en France : Jean Rousset, Marcel Raymond et Victor-L. Tapié. J'ai découvert la poésie baroque d'abord et grâce à l'Anthologie de la poésie baroque française (1961) de Jean Rousset. Avec ses forces et ses limites, cette anthologie est une bonne introduction. Tu la trouves aujourd'hui chez Corti (2 vol.). Limites que la limite de la forme anthologique par elle-même, de ne présenter qu’un mince aspect de certaines œuvres et ne donnant pas l’immense dimension d’un D’Aubigné, d’un Du Bartas ou d’un Chassignet ou d’un Sponde, et introduisant curieusement quelques « classiques » comme Corneille ou Racine (curieusement, car il n’est rien de plus anti-baroque que le Classicisme), ainsi que limite de présenter souvent des poètes mineurs, sans importance, oubliés à juste raison (cela dit, le lecteur fait la différence), mais cette anthologie a la vertu d'être thématique et de présenter la poésie baroque à travers ses constantes perceptibles tantôt par fragments, tantôt par poèmes entiers, l'inconstance noire, l'inconstance blanche, l'air, l'eau, la métamorphose, l'illusion, le spectacle de la mort ; montrant qu’il n'est pas d'œuvres poétiques typiquement et entièrement baroques, il y a des monstrations plus ou moins nettes, attestant sans doute qu’il n’y a pas de poètes baroques, mais, oui, plutôt, des poèmes baroques, ou des passages, faits d’engendrements d'images, de métaphores qui filent et se reproduisent et métamorphosent le poème sous nos yeux, il y a, il y aurait tant et tant, mais des mots comme branle, inconstance, variation, mutation, labilité,