Blason
Cours de Daniel Martin
Mercredi 14h-16h
Le texte au programme. Présentation
Publiée anonymement à Lyon en 1544, la Délie de Maurice Scève se signale par plusieurs singularités. Le recueil constitue le premier canzoniere français, c’est-à-dire le premier recueil de poésie amoureuse s’inscrivant dans la tradition du recueil fondateur de Pétrarque auquel la tradition éditoriale a donné le titre de Canzoniere. Ce genre connaîtra en France un immense succès à partir de 1549, date de publication de L’Olive de Du Bellay. On pourra, comme point de départ, pour en vérifier la pertinence et en mesurer les limites, se référer à cette définition du genre du canzoniere proposée par Gabriel-André Pérouse : “ Nous entendons par là un ensemble de pièces lyriques (c’est-à-dire de la nature du chant) adressées à un être que l’on présente comme passionnément aimé. Le poète y exprime les émotions que cette passion suscite en lui, de l’entrée en amour jusqu’à l’angoisse et peut-être au triomphe, dans un va-et-vient douloureux entre “ vie ” et “ mort ” – cette passion terrestre s’inscrivant plus ou moins explicitement dans une expérience mystique “ platonicienne ” (du sensible à l’intelligible) et se traduisant par les grandes métaphores issues de l’Antiquité et relayées par Pétrarque : feu et glace, blessure et guérison, liberté et esclavage. ” (Introduction à Philibert Bugnyon, Erotasmes de Phidie et Gelasine, Genève, Droz, 1998, p. XXI). L’être passionnément aimé qui s’inscrit au centre du recueil de Scève est précisément Délie, héroïne éponyme associée d’emblée à la vertu, et à la quête de la vertu par l’amant poète, et cependant objet de désir, qui ne cesse, par sa froideur, par ses refus, par son insensibilité, de renouveler les morts d’amour de l’amant (“ … Mais bien les mortz, qu’en moy tu renovelles / Je t’ay voulu en cest Œuvre descrire ”, épître liminaire “ A sa Delie ”, p. 3 de l’édition au programme). Il