Brise marine
La chair est triste, hélas! et j'ai lu tous les livres. Fuir! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D'être parmi l'écume inconnue et les cieux! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son enfant. Je partirai! Steamer balançant ta mâture, Lève l'ancre pour une exotique nature! Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l'adieu suprême des mouchoirs! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages Sont-ils de ceux qu'un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots... Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots!
Introduction : Le thème de l'ailleurs, du départ, du voyage parcourt le 19ème siècle comme l'obsession de la fuite et le refus répété du réel immédiat. Dans le sillage de Baudelaire, Mallarmé exprime dans un élan lyrique comparable à un envol. Le dégoût du présent et l'appel irrésistible du large, des orages et de l'azur. Construit à partir de l'énumération de ce que refuse le poète, le texte est l'affirmation répétée qui ne conduit pourtant pas à un véritable départ. Le voyage rêvé apparaît ainsi comme la métaphore de l'inspiration. L'élan créateur est un appel vers une réalité autre, à la fois dangereuse et séductrice. Nous montrerons comment, dans ce poème le voyage maritime souhaité prend, au-delà de ses justifications personnelles une justification symboliques II- L'appel du voyage, le refus de l'environnement.a) une constation désabusée Au début du poème, l'auteur exprime son désir de partir : impératifs, affirmations. L'ennui, la cause est mis en relief (avec la majuscule) plus tard dans le texte. b) le refus des liens La négation du début du texte sert à renier tout ce qui pourrait encore rattacher l'auteur à ce monde. Elle est complétée par une série de négations (vers 4-6-8) : reprise de "