Commentaire composé
« L’Albatros »
Charles Baudelaire
Introduction :
Deuxième poème de la section Spleen1 et Idéal des Fleurs du Mal, publié en
1857, « L’Albatros » aurait été écrit lors d’un voyage auquel Baudelaire avait coutume de se livrer pour s’arracher des tentations parisiennes.
De retour de l’Ile Maurice, le poète voit des albatros s’abattrent sur le sillage du bateau. Les marins amorcent l’animal en lui jetant de longues lignes armées d’un hameçon garni. Le palmipède se laisse facilement prendre à cet appât perfide.
Lecture
Cependant, ce poème n’est pas une narration anodine d’un fait divers. Poète-maudit,
Baudelaire souffre d’une difficulté d’adaptation au monde réel ; il ne supporte la condition humaine qu’en plaçant entre elle et lui, l’écran de l’opium.
Aussi nous verrons dans quelle mesure « L’Albatros » révèle l’incapacité du poète à s’intégrer dans la société.
Pour ce faire, nous étudierons l’histoire quotidienne d’un oiseau raillé pour analyser ensuite le glissement parabolique vers la métamorphose du poète-oiseau.
I . Le quotidien d’un oiseau raillé
Baudelaire décrit une scène banale, celle d’un albatros « vastes oiseau des mers » (v2). Le groupe nominal périphrastique mis en relief (une hypallage), présente un animal majestueux et insouciant « indolent » (v3).
Nous noterons la double allitération en en [-s] et [-z], mimétique à la fois, du glissement du bateau et de la perfidie des hommes.
Le poète utilise un vocabulaire positif lorsqu’il est question du vol « vastes » (v2),
« compagnons » (v3), « rois de l’azur » (v6).
La première strophe est une mise en situation, un récit d’habitude marqué par l’adverbe « souvent » (v1), couplé au présent à valeur de vérité générale
« prennent » (v2), « qui suivent » (v3). Nous savons également qu’il s’agit d’un amusement « pour s’amuser » (v1) qui aurait pu sembler bon enfant sans les allitérations en [-g] et en [-r], « le navire glissant sur les gouffres amers » (v4) qui par