Les Fleurs du Mal traduisent la quête existentielle d’un être déchiré entre Spleen (malheur et mélancolie) et Idéal (harmonie et bien-être). Mais le recueil emprunte aussi la démarche d’une quête esthétique, une quête du Beau dont la définition, indissociable de l’ambiguïté et du mystère, ne laisse pas de surprendre. Son auteur, le poète symboliste Charles Baudelaire (1821-1867) a d’ailleurs déclaré lors de l’Exposition Universelle de 1855: « Le Beau est toujours bizarre (...) Il contient toujours un peu de bizarrerie, de bizarrerie naïve. Et c’est cette bizarrerie qui la fait être particulièrement le Beau. C’est son immatriculation, sa caractéristique. Renversez la proportion et tâchez de concevoir un Beau banal!» Cette déclaration de Baudelaire nous suggère que le poète conçoit la beauté d’une façon tout à fait particulière et marginale pour son époque dominée par le Classicisme. Pour expliquer les propos de Baudelaire nous évoquerons dans un premier temps la conception d’un «Beau bizarre» défendue par le poète et par des artistes plus contemporains considérés comme étant ses «héritiers», puis la conception d’un «Beau banal» opposée à celle de Baudelaire.
Baudelaire s’inscrit incontestablement comme celui qui est à l’origine de la modernité dans le domaine des arts. Sa poésie a, en effet, rompu avec toute une tradition en associant le Beau au «bizarre» pour reprendre une expression qu’il emploie dans un article écrit à l’occasion de l’Exposition universelle de 1855. «Bizarre» c’est-à-dire étrange, surprenant, original, décalé, bref recherchant l’écart avec la norme. Pour qui connait la poésie de Baudelaire, les exemples ne manquent pas dans son oeuvre «Les Fleurs de Mal», pour illustrer cette conception reposant sur cette notion de «bizarre». Effectivement, dans son recueil, la laideur est une source d’inspiration pour le poète qui l’assimile à la beauté. Dans son poème «Une Charogne» Baudelaire fait l’éloge de l’horreur dont il cherche à extraire la beauté, en