Créer, est-ce conjurer la mort ?
Sujet de dissertation philosophique proposé aux élèves de section L en DST le 14 janvier 2006
Ce sujet a donné lieu à deux copies excellentes, et à plusieurs copies très solides. Je voulais d'abord remercier leurs auteurs (Solène, Olivier, Manon, Benoit, Lucile et Sabrina) pour des recherches authentiquement philosophiques, et ce avec d'autant plus d'ardeur que la question s'avérait d'une richesse et d'une difficulté considérables. Atteindre une vue synthétique du problème n'avait rien d'évident. Bravo à ceux et celles qui y parvinrent.
1. Détermination du problème
1.1. Définitions
Le verbe fort "créer" désigne l'acte par lequel un agent (le "créateur", et surtout pas le "créatif") fait advenir à l'existence une chose qui, jusque-là, n'existait pas. La "création" par excellence est celle de l'univers par Dieu. Dans un sens élargi - celui dont il était question ici, puisque, par définition, Dieu ne peut pas mourir -, on acceptera parmi les "créations" l'accomplissement de l'artiste (voir par exemple le travail d'Yves Tanguy ; à contester, le cas échéant, par la dévaluation de l'artiste dans la République de Platon), et même l'invention de l'ingénieur. "Créer" se distingue ici de "composer", ce qui consisterait seulement à présenter des choses connues dans un ordre inédit (on "compose" un bouquet, par exemple). Cette distinction méritait toutefois des nuances avec la composition musicale, notamment. Par ailleurs, la génération n'avait guère sa place dans la copie, puisqu'il s'agit stricto sensu de reproduction, non de création originale.
(Pour information : le correcteur de philosophie attend légitimement d'élèves littéraires qu'ils se soient essayés à la création artistique et qu'ils disposent d'une expérience de première main, personnelle, et je dirais même charnelle. N'attendez pas avril pour écrire, peindre, composer de la musique, sculpter...).
Le cours sur la conscience réfléchie et l'existence permettait de