Cultures et conflits berbère
Vision de la Kabylie d’Emile Masqueray : nouvelle intitulée "Les femmes des Barbares"
Voici un texte tiré de l’oeuvre d’Emile Masqueray "Souvenirs et vision d’Afrique" Cela nous donne une idée dont les chercheurs coloniaux peignaient les moeurs des villages kabyles dans la seconde partie du XIXe siècle.
Le combat
Le soleil du 1er juin 1835 éclaire la Kabylie depuis une heure. Les parois aériennes du Djurdjura, irisées comme des gorges de tourterelles, se découpent au milieu de l’azur du ciel. Des montagnes noires et vertes ondulent au-dessous comme des vagues énormes dans les vapeurs qui s’élèvent des vallées, et chacune d’elles porte sur ses pitons des villages de guerre dont les maisons, sans fenêtres et bien jointes, brillent couvertes de tuiles rouges. Dans le fond d’un ravin, des coups de fusil pétillent, et des fumerolles s’élèvent en spirales. Ce sont Aït-Ali et Zaknoun qui vident une vieille querelle. Des aigles bruns passent très haut, les ailes étendues, et des vautours jaunâtres tournoient d’un vol lent.
Aît-Ali est un village de 1.200 âmes, composé de trois familles, dont une seule peut mettre en ligne 200 mâles. Chacune d’elles porte, comme les génies de Rome, le nom d’un ancêtre, et ses membres ne se distinguent que par des prénoms ; chacune est gouvernée par ses guerriers ; chacune a son honneur personnel, ses amours et ses haines, comme un être vivant ; mais elles ont trouvé utile de s’unir autrefois, et de cet accord est née cette Taddèrt posée sur le milieu d’une crête comme un gros nid.
Zaknoun, sur la crête d’en face, est tout pareil. Lui aussi se compose de trois familles barbares cimentées comme trois blocs ; lui aussi est une république dont les chefs sont tous les adultes qui portent des armes. Des deux parts un Ancien est élu parmi les plus prudents ou les plus braves pour présider le conseil ou diriger la guerre. Seulement Zaknoun n’a pas autant de fusils qu’Aît-Ali. Même en comptant