Dolores ibarurri
« Comment penses-tu pouvoir devenir institutrice alors que tes frères sont ouvriers ? » lui répète sa mère. Misère et ignorance. Dolores ne dépasse pas le cours préparatoire à l'école normale. Elle abandonne les cahiers pour les ateliers de couture puis pour les cuisines des maisons bourgeoises. « La seule issue, l'unique aspiration pour une femme dans mon village, c'était le mariage », disait-elle, avant d'ajouter : « Une vie grise, une vie d'esclave. »
Pour obtenir la main de la jeune et belle Dolores, les prétendants ne manquent pas. C'est Julian Ruiz Gabina qu'elle choisit. Un militant socialiste qui « ne savait pas danser », mais lui offrait ses premiers livres. Elle se marie à l'église de Gallarta et quitte pour la première fois son village pour Santander : un bref voyage de noces dans la famille de son époux avant de s'installer, non loin de là, à Somorrostro. Elle va vite vérifier la dure vérité du proverbe espagnol : « Mère ? Qu'est-ce que se marier ? Fille, c'est coudre, faire des enfants et pleurer. »
Pleurer ? Dolores Ibarruri en aura trop souvent l'occasion : la mort de deux de ses enfants en Espagne, la disparition de son fils Ruben à Stalingrad pendant la Seconde guerre mondiale, l'incompréhension de sa famille, son mari en prison pour idées subversives. « Je suis devenue socialiste à force de côtoyer l'injustice, la misère, et je n'avais pas besoin de me regarder dans un miroir pour voir combien souffraient les autres femmes », soulignait-elle.
Dolores partage les idées de son mari. 1917 va être pour elle une date décisive. Lorsqu'elle apprend la victoire de la révolution