Entreprise et éthique
« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes ». Ford semble de prime abord souligner l’importance de l’éthique, c’est-à-dire de la science des principes régulateurs de la conduite morale, dans l’entreprise. Néanmoins son assertion ne laisse pas d’être ambigüe : par réputation, on peut entendre qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une conduite morale, mais qu’il suffit à l’entreprise de paraître morale dans le but d’accroître sa notoriété, d’améliorer son image et donc ses profits. Dans cette perspective du faux-semblant, nous dirions qu’il s’agirait davantage d’« étiquette » que d’« éthique ». Ceci amène une distinction entre deux formes d’agir, celle de l’agir moral – par pur désintéressement – et de l’agir par conformité à la morale – par intérêt. Bien que Kant, dans la Métaphysique des Mœurs, ne considère pas qu’agir par conformité à la morale soit un comportement éthique, nous comprendrons l’agir éthique comme les actions en phase avec l’ensemble des règles concernant les actions permises et défendues dans une société.
Si la question de l’éthique d’entreprise a traversé les époques, il est des périodes de l’Histoire où son importance est accrue : les temps de guerre. Il est vrai qu’en ces années troubles, où bien souvent les nationalismes sont exacerbés, la veine patriotique exige des entreprises un comportement particulier, adapté à la situation de guerre. L’entreprise est alors considérée, plus que jamais, comme une entité morale qui doit répondre au bien commun – elle serait alors dotée de responsabilités non seulement économiques mais aussi sociales. Pourtant, la vocation première d’une entreprise en système capitaliste n’est pas de répondre à des exigences sociales, mais, comme le soulignerait Milton Friedman, de réaliser des profits, de produire des richesses destinées à ses actionnaires. On entrevoit donc que, même si une