Explication de texte spinoza
Il s'agit pour Spinoza dans ce texte d'élucider ce que l'État doit être. Pour ce faire, sans doute faut-il d'abord dégager la finalité qui est la sienne : pour savoir comment doit être fait un marteau, mieux vaut partir de la fin qui le définit, c'est-à-dire de son usage, si tant est que cet outil n'aurait ni cette forme, ni cette matière, s'il servait à peindre les murs. Alors, quel est le but de l'État comme entité politique et modalité d'organisation du pouvoir ? S'agit-il seulement de faire régner l'ordre public et d'assurer la paix civile, fût-ce au prix de la coercition si cela devait s'avérer nécessaire ? Non pas : s'il est bien que la sûreté règne, elle ne régnera que si l'État permet aux citoyens d'user de leur raison, c'est-à-dire s'il se pose en garant de la seule liberté véritable, celle d'agir conformément à ce que la raison recommande, et non en obéissant à ce que les passions ordonnent. C'est alors bien à tort qu'on a pu croire que l'État n'était qu'un instrument destiné à nous ôter la raison, ou la liberté : un État, du moins un État qui mérite ce nom, n'ambitionne pas de faire de ses citoyens autant de « bêtes brutes » ou « d'automates », ce qui revient finalement au même. Tout au contraire, l'État est là pour permettre que tous « usent d'une raison libre » ; et ce faisant, il protégera chacun contre la « malveillance » des autres, car la malveillance naît de l'emprise qu'ont sur nous les passions mauvaises, comme la haine ou la colère.
Tel est donc le sens de la thèse spinoziste : les désordres viennent des passions, et le trouble public sera écarté si l'État, loin de faire régner la sécurité par la terreur (qui est encore une passion), favorise au contraire le libre exercice de sa raison par chacun. Si l'État a pour finalité réelle l'obtention de la liberté, alors « une seule chose est nécessaire » : qu'on fixe par avance et une bonne fois à qui appartiendra « tout le pouvoir de décréter » les lois, entendons par là le pouvoir