Expos
Pour contribuer à l’analyse des processus par lesquels l’action publique contribue à diffuser des principes de perception du monde social et à encadrer les pratiques qui peuvent légitimement s’y accomplir, la confrontation directe des populations dites « marginales » ou « à problèmes » auxquelles sont destinées des aides sociales aux agents et institutions qui, procédant à leur octroi, actualisent les normes et catégories étatiques associées à ces aides, nous est apparue comme un angle d’observation particulièrement pertinent. Le versement d’allocations et aides liées aux différents « risques sociaux » repose en effet sur un ensemble de critères, eux-mêmes fondés sur des définitions historiquement et socialement situées et légitimées par l’État (de la famille, du travail, des âges de la vie, etc.). Il implique plus précisément de faire correspondre la définition des situations des demandeurs à ces catégories préétablies. L’octroi de ces aides conduit donc à opérer en pratique l’imposition de ces critères formés par et pour l’action publique dans la définition légitime des situations individuelles. Et c’est là un enjeu d’autant plus fort que les agents sociaux concernés sont plus démunis économiquement, culturellement, symboliquement, et partant plus dépendants des aides qui leur sont consenties. C’est dans cette perspective qu’on a été amené à orienter nos travaux vers le traitement bureaucratique de la misère, au cours duquel se réalise cette confrontation entre populations démunies et normes étatiques. On l’abordera de deux manières. Il s’agira tout d’abord de montrer comment se joue l’inculcation de ces normes dans le rapport quotidien avec l’administration. On explorera ensuite les modalités et les enjeux des dispositifs de surveillance et de sanction dont le travail de « mise aux normes » bureaucratiques est l’occasion, à partir d’une recherche en cours sur le