Gargantua, chapitre xxii
Chapitre XXII : Comment Gargantua employait le temps quand l’air était pluvieux
Dans son livre Gargantua, publié en 1534, apparaît le génie aux multiples facettes de Rabelais, dont deux aspects fondamentaux se retrouvent dans son héros éponyme. En effet, il souhaite tout d’abord transformer ce héros en un « abyme de sciences », et prône pour cela la curiosité universelle et l’épanouissement physique et moral de l’être emprunté au naturalisme et antique ; mais veut aussi réagir contre l’ascétisme chrétien marqué à cette époque par la contrainte des esprits et des corps. Ainsi Rabelais s’oppose-t-il aux méthodes d’éducation du Moyen-Âge, en opposant la première éducation reçue par son héros – de longues études ingrates et entièrement livresques, sans rapport avec la vie ni la connaissance du monde– à la seconde, lorsque Grandgousier l’envoie à Paris où, sous la tutelle de Ponocrates, il sera remis sur la bonne voie.
Comment l’idéal humaniste s’exprime-t-il dans le chapitre 22, où le narrateur décrit la manière dont Gargantua occupait son temps quand l’air était pluvieux ?
Nous montrerons tout d’abord l’aspect encyclopédique de cette éducation qui se veut universelle, puis nous insisterons sur son aspect ouvert au monde et aux expériences concrètes, avant de souligner qu’elle est dominée par la joie de vivre et le pouvoir de transmission.
I. Une éducation encyclopédique à la taille d’un géant
Le philosophe relie, l. 2-3, les chapitres XXI et XXII, en expliquant que « le temps d’avant dîner était employé comme de coutume ». Ses activités matinales restent les mêmes, mais au lieu de sortir en plein air, il fait allumer « un beau et clair feu pour corriger l’intempérie de l’air ». La lumière du feu qui illumine la maison remplace donc celle du soleil, et montre que l’éducation de Gargantua est placée sous le signe de la joie de vivre, que symbolise ce « beau et clair feu ».
a) Ponocrates sollicite la curiosité de son élève dans