Interventionnisme canadien
LI Z E TTE J A L B E R T
U NIVERSITE DU Q UEBEC A MONTREAL
COLLECTION CAHIERS DU GTRETSÉ No 9
Février 1992
2 L’État interventionniste de providence canadien en perspective
L'ÉTAT INTERVENTIONNISTE DE PROVIDENCE CANADIEN EN PERSPECTIVE
Spécificité ou excentricité Au Canada, on ne peut parler d'interventionnisme, d'État-providence ou de régulation de type fordiste, sans retenir le tournant des années 1960 comme période charnière (Blomqvist, 1985: 124) d'où partira un mouvement d'expansion de tous ces processus, d'abord entamés timidement avec l'entre-deux-guerres, puis poursuivis à une vitesse de croisière modérée après la Deuxième Guerre jusqu'à la fin des années 1950. Période cruciale qui servira également de tremplin à la montée, au premier plan des enjeux politiques, du provincialisme et des États provinciaux. Jusque-là plutôt timorés dans l'ensemble et peu enclins à contester le leadership fédéral, les gouvernements provinciaux vont sortir de l'ornière pour amorcer leur procès d'autonomisation. Une telle entreprise sera menée au nom des intérêts provinciauxrégionaux qu'ils représentent ou croient représenter, mais aussi, en mettant de l'avant des objectifs propres d'appareil ou encore en véhiculant ceux des élites qui en sont issues. Mus par un volontarisme politique inusité, et nouvellement résolus à peser sur l'orientation économique et sociale de leur territoire, ces gouvernements provinciaux chercheront désormais à établir avec le gouvernement fédéral un nouveau rapport de force. De là, débordant le cadre de leur province, ils voudront élargir leur influence en participant de plain-pied, et à leur juste mesure, à l'exercice du pouvoir à l'échelle du pays tout entier. La phase d'expansion de l'État interventionniste de providence, telle qu'elle se poursuit au même moment au sein de la plupart des pays industrialisés du centre (Heclo, 1981: 386-387), emprunte donc au Canada