La croissance est-elle sans fin
Introduction : Au milieu du XXème siècle, les pays développés se sont donnés une représentation économique simple en projetant aussi bien l’infinie diversité des biens et de services que la plupart des rapports sociaux dans le miroir de la production. Ayant bâti des systèmes de comptabilité nationale, ils ont pu résumer leur performance économique globale en un seul chiffre, le PIB, et mesurer sa croissance annuelle. Celle-ci est devenue l’indicateur fétiche d’une finalité suprême, d’un état du monde, selon la vision des pays les plus riches qui ne doutaient d’ailleurs pas que cette vision devait être partagée par tous. Si le miroir n’a pas disparu, il semble s’être brouillé depuis quelques décennies. Quelques années avant le déclenchement de la crise des années 1970, la croissance a été contestée comme finalité en soi par une fraction des jeunes générations des pays les plus favorisés («on ne tombe pas amoureux d’un taux de croissance») et sa possibilité même mise en cause dans le rapport fameux issu des travaux du Club de Rome, intitulé The limits to growth » (Halte à la croissance ? dans sa traduction française). Dans quelle mesure peut-on encore évoquer aujourd’hui la fin de la croissance économique ? Les moteurs de la croissance sont-ils aussi pérennes que le laissent entendre les «nouvelles théories de la croissance» ?La notion de «croissance soutenable» n’est-elle pas l’ultime avatar des thèmes défendus dans le «Livre des limites» de 1972?La croissance infinie est-elle toujours relié au progrès du bien-être? Il apparaît qu’au moment même où l’analyse économique semble pouvoir remettre en cause l’épuisement du processus de croissance tant craint par les classiques (I), les contraintes naturelles rendent insoutenables les rythmes de croissance observés et leur généralisation à l’échelle planétaire (II). Le divorce entre croissance et progression du