La folie en littérature
Texte n°1 :
Personnage atypique, Lewis Caroll inscrit son œuvre dans la tradition littéraire, extrêmement féconde en Angleterre, de la littérature de jeunesse. Et pourtant, n'y a-t-il œuvre plus dérangeante, plus absurde et plus complexe ? Et comme le dirait Alice, à quoi bon un livre sans image ? L'extrait qui suit est l'un des plus célèbres du roman... Elle était en train de faire ces réflexions, lorsqu’elle tressaillit en voyant tout à coup le Chat assis à quelques pas de là sur la branche d’un arbre. Le Chat grimaça en apercevant Alice. Elle trouva qu’il avait l’air bon enfant, et cependant il avait de très-longues griffes et une grande rangée de dents ; aussi comprit-elle qu’il fallait le traiter avec respect. « Grimaçon ! Commença-t-elle un peu timidement, ne sachant pas du tout si cette familiarité lui serait agréable ; toutefois il ne fit qu’allonger sa grimace. Allons, il est content jusqu’à présent, pensa Alice, et elle continua :
– Dites-moi, je vous prie, de quel côté faut-il me diriger ?
– Cela dépend beaucoup de l’endroit où vous voulez aller, dit le Chat.
– Cela m’est assez indifférent, dit Alice.
– Alors peu importe de quel côté vous irez, dit le Chat.
– Pourvu que j’arrive quelque part, ajouta Alice en explication.
– Cela ne peut manquer, pourvu que vous marchiez assez longtemps » Alice comprit que cela était incontestable ; elle essaya donc d’une autre question : « Quels sont les gens qui demeurent par ici ?
– De ce côté-ci, dit le Chat, décrivant un cercle avec sa patte droite, demeure un chapelier ; de ce côté-là, faisant de même avec sa patte gauche, demeure un lièvre. Allez voir celui que vous voudrez, tous deux sont fous.
– Mais je ne veux pas fréquenter des fous, fit observer Alice.
– Vous ne pouvez pas vous en défendre, tout le monde est fou ici. Je suis fou, vous êtes folle.
– Comment savez-vous que je suis folle ? dit Alice.
– Vous devez l’être, dit le Chat,