La mémoire corporelle
Le corps est, pour l’enfant qui apprend sa langue première, le premier système de référence. Le corps est donc le « système des systèmes ».Tous les autres systèmes de référence se forment ultérieurement sur le modèle du corps.
C’est la mémoire corporelle. En donnant l’exemple des deux célèbres compositeurs Mozart et Beethoven, nous comprendrons mieux l’apport de cette mémoire dans notre vie.
Mozart écrit de Vienne le 28 avril 1784: « quand je jouais devant lui [le pianiste Richter], il regardait continuellement mes doigts et disait tout le temps: - Mon Dieu! Que d'efforts ne faut-il pas que je fasse... jusqu'à en suer... et pourtant je n'obtiens aucun succès!...et vous mon ami, tout cela n'est qu'un jeu pour vous! - Oui, lui dis-je, mais j'ai dû me donner aussi beaucoup de peine pour arriver à n'avoir plus à m'en donner maintenant ». Wilder rapporte que les Napolitains s'émerveillaient de l'habileté de Mozart au point de croire que la bague qu'il portait à l'annulaire était « enchantée ». C'est ce qui est aussi à l'origine du titre de la composition « La flûte enchantée ». A table Mozart ne pouvait découper ses aliments sans risquer de se blesser tellement il était maladroit!
Beethoven, qui aimait à composer en marchant par la campagne, fredonnait ou chantait à pleine voix. Devenu sourd il continua cette pratique bien qu'il ne s'entende plus lui-même. Ses mouvements physiologiques vocaux le servaient encore et continuaient à fortifier sa mémoire auditive interne. Il lui a été possible « d'écouter » des œuvres d'après la mémoire corporelle, mouvements de poitrine pour les sons graves, registre palatal pour les sons médiums, registre de tête pour les aigus, ainsi que toutes les précisions de gestes associés, efforts de la gorge, mouvements réguliers et inclinaisons de la tête, mais aussi des bras ou des jambes... les images motrices ravivent la mémoire