P.Quignard, Tous les matins du monde

Quelle place tient le silence dans le roman et dans le film ?

Introduction

« Le désir d’écrire se nourrit peut-être, originairement, d’un vœu de silence » écrit D. Rabaté dans l’ouvrage qu’il consacre à P. Quignard, auteur du roman Tous les Matins du monde, écrit et publié en 1991, et dont Alain corneau réalise l’adaptation filmique la même année. Pour P. quignard en effet le silence est lié à l’écriture : « J’ai écrit parce que c’était la seule façon de parler en me taisant » déclare -t-il dans Le Nom sur le bout de la langue. On ne s’étonnera donc pas que le silence prenne une place importante dans TMM, œuvre pourtant consacrée à la vie de deux musiciens. Quelle place tient ce motif dans le roman et dans le film qui porte le même titre? Nous verrons d’abord que le silence est une composante du récit parce qu’il est un trait de caractère des personnages ou une réponse aux événements dramatiques qu’ils sont amenés à vivre. Nous étudierons ensuite la valeur du silence, préférable au bruit et à la parole, ainsi que sa fonction philosophique et religieuse : le silence n’est-il pas un préalable indispensable à la méditation et à la communion ? Enfin nous analyserons les liens à établir entre le silence et l’art : en quoi la musique et la peinture baroques, si présentes dans les œuvres de Quignard et de Corneau, se nourrissent aussi de silence ?

I.- Le silence est une composante du récit ( fonction narrative) La place qu’il occupe dans le roman vient d’abord de ce qu’il est un trait de caractère des personnages ou une réaction aux événements tragiques auxquels ils sont confrontés.
a) Le silence caractérise essentiellement Monsieur de Ste Colombe qui est un homme taciturne. « Il n’était pas capable d’un entretien suivi avec personne » et « ne s’entendait guère à parler (chap.II). Il éprouve de la difficulté à communiquer avec ses filles, mais entend aussi sa femme lui faire remarquer