III. Les réserves de Gracq par rapport à la structure des œuvres proustiennes

Finalement, Gracq accorde que, dans La Recherche, le sujet (le souvenir, le passé, les personnages... ) importe moins que la façon dont il est traité, que la matière dans laquelle il s'incorpore : le style de Proust. Le fond semble donc moins important que la forme, que le matériau utilisé pour décrire, dont "la densité, la solidité intrinsèque, sont suffisantes pour que la juxtaposition suffise à l'équilibre". Même si Gracq reconnait cela, il ne semble pas pour autant l'approuver et formule toutefois quelques critiques à l'égard de la structure de l'œuvre.

• remarques sur l’enchainement des séquences dans la Recherche: «multiplication cellulaire par dédoublement des noyaux» pas de véritable articulation cohérente, dès que des éléments assez importants apparaissent, Proust attire le regard du narrateur sur eux (exemple avec Bergotte, car d’abord juste évocation puis passage entier sur lui). Cet élément devient autonome par rapport à ce qui précède alors qu’au départ ce n’était qu’une petite partie du décor, de la masse. Proust = obligation d’enrichissement, de multiplication des éléments > l'univers de Proust semble infini, les souvenirs enchâssés les uns dans les autres, se succèdent indéfiniment les uns aux autres

conséquence pour le lecteur : confusion car tous les éléments sont difficiles à relier par rapport à leur chronologie, à leur spatialité de ce qui précède Pour Gracq, cet étoffement permanent de l’histoire traduit un manque d’organisation de la part de l’auteur

• remarques sur la composition interne de l’œuvre: juxtaposition d’éléments suffit à l’équilibre malgré l’absence de base, de ciment (seul ciment qui relie les éléments entre eux : les réflexions profondes de Proust à partir d'une sensation, au cours desquelles il décompose chaque élément > le lecteur peut s'y perdre)
Chaque partie contient des éléments, parmi