L’ouverture selon Umberto Eco

L’œuvre ouverte

Pour donner une définition de l’œuvre ouverte, Umberto Eco s’appuie sur la notion reconnue par la plupart des esthétiques contemporaines d’ambiguïté. Selon celles-ci, « l’œuvre d’art est un message fondamentalement ambigu, une pluralité de signifiés qui coexistent en un seul signifiant[1]. » Si cela se vérifie pour toute œuvre d’art, l’ambiguïté devient une « fin explicite », « une valeur à réaliser de préférence à toute autre » dans le cas de certaines œuvres d’art contemporaines qu’il qualifie d’ouvertes[2]. À cette fin, « les artistes contemporains ont souvent recours à l’informel, au désordre, au hasard, à l’indétermination des résultats[3]. » Si l’ambiguïté du message est accentuée, il appartient alors au récepteur d’avoir un rôle actif[4]. Cette activité nécessaire du récepteur a aussi une influence sur la poétique qu’il définit comme « le programme opératoire que l’artiste chaque fois se propose ; l’œuvre à faire, telle que l’artiste, explicitement ou implicitement, la conçoit[5]. » Une recherche sur une poétique spécifique peut en effet se baser sur une étude des déclarations explicites de l’artiste, mais aussi sur une étude de la structure de ses œuvres. L’œuvre définitive est alors vue comme révélatrice de la volonté qui a présidé à sa création. La poétique ne s’intéresse donc pas seulement à l’artiste et ses intentions, mais aussi aux « structures définitives de l’objet artistique, considérées comme significatives d’une intention de communication[6]. » Cependant, pour Eco, une poétique ne devrait pas seulement prendre en compte le pôle de la création, mais aussi celui de la consommation pour au moins deux raisons. D’une part, l’artiste sait « qu’il structure à travers son objet un message : il ne peut ignorer qu’il travaille pour un récepteur[7]. » D’autre part, dans le cas d’une poétique implicite, c’est au travers de la manière dont le récepteur jouit de l’objet qu’il peut