Le Loup et l Agneau
Le Loup et l'Agneau (1668)
Jean de la Fontaine
La raison du plus fort est toujours la meilleure :
Nous l'allons montrer tout à l'heure. Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure*,
Et que la faim en ces lieux attirait.
Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère.
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens :
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts
Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès.
* A l’époque, signifiait chercher les problèmes. Donc péjoratif. Précense du subtentif « Faim ».
Le loup et L’agneau : Opposition manichéenne
Et : Valeur normalement additive mais ici adversaire.
Répartition de la parole, dialogue :
Il y a un relatif équilibre (loup : 9vers ; agneau : 11 vers). On ne s’attend pas à ce que l’agneau soit celui qui parle le plus. D’ailleurs, avec des arguments rationnels, il tente de convaincre le loup. Il emploi d’ailleurs :
Un adjectif numéral (vingt, v.15) > preuve par le chiffre).
Un comparatif (plus de, v. 15)
Une énumération de connecteur logique à valeur déductive (Et que, par conséquent, en aucune façon, v.16)
Une question rhétorique (comment