Le romantisme s’incarne dans son héros, qui est avant tout un individu plutôt qu’un archétype, comme il devait l’être au siècle précédent. En effet, les personnages romantiques ont une histoire, une psychologie, bien avant qu’ils ne soient mentionnés dans un roman. Le héros de la première vague du romantisme – celle où l’on cherchait avant tout la libération de l’art – est un homme sensible, auquel son destin échappe, et dont la société nie les aspirations. Cela transparaît dans sa façon d’être, son ennui, son désœuvrement, son désespoir. Pour montrer son refus du monde qui l’entoure, sa révolte contre les normes bourgeoises, il vit souvent une vie de débauche : drogue, alcool, conquêtes sont son quotidien (par exemple, Lorenzaccio, de Musset, ou d’Albert, de Gautier). Il privilégie la bohème. La seconde incarnation du héros romantique présente encore sensiblement les mêmes caractéristiques, sauf qu’il est mû par un profond sentiment d’injustice sociale, injustice qu’il tente de redresser. C’est le héros des grands romans historiques : Quasimodo, Jean Valjean. Ces héros correspondent à l’idéal de la seconde vague du romantisme, celle où l’on cherchait, après avoir libéré l’art, à libérer le peuple.
Le héros romantique est assez éloigné du prototype grec ou cornélien. Il n’est pas tenu quant à lui à affronter des forces extérieures qui le transcendent et qu’il ne peut guère combattre ( la divinité, le fatum…) Son action se plie aux épanchements d’un individualisme lyrique ; les hauts faits valeureux et glorieux cèdent le pas chez lui à des préoccupations ontologiques et subjectives ; bref, le héros romantique est voué à une solitude existentielle. Il est révolté contre son sort et contre la société qu'il juge médiocre. Il vit tout avec passion comme si ses jours étaient comptés; la passion amoureuse le dévore, il lui sacrifie tout. En rébellion contre les règles communes auxquelles chacun doit se soumettre, il se situe parfois hors la loi. Son attitude de refus et