Le rôle et la mise en oeuvre des pouvoirs du premier ministre dans le système de la cohabitation
Dans le système de cohabitation apparu en mars 1986, le Premier ministre – politiquement hostile au président de la République – est le chef de l’exécutif alors que le président se cantonne dans sa fonction d’arbitre, conformément à la Constitution du 4 octobre 1958. Dès janvier 1959, en contradiction avec le régime parlementaire instauré par le constituant de 1958, le présidentialisme s’est imposé à l’initiative du général de Gaulle, le chef de l’Etat déterminant et conduisant la politique de la nation, assisté du Premier ministre, principal collaborateur de l’Elysée. Le présidentialisme s’est renforcé en 1962, avec l’avènement du phénomène majoritaire, cependant que le présidentialisme a été confirmé sous Georges Pompidou, menacé sous Valéry Giscard d’Estaing, accru sous François Mitterrand I, restauré sous Mitterrand II, rétabli sous Jacques Chirac I, avant de triompher sous Chirac II dans un contexte bipartisan (depuis mai 2002). Or, ce type de régime nécessite la coïncidence entre la majorité présidentielle et la majorité parlementaire. Justement, à trois reprises, en mars 1986 (mars 1986-mai 1988), en mars 1993 (mars 1993-mai 1995) et en juin 1997 (juin 1997-mai 2002), le chef de l’Etat a perdu sa majorité parlementaire à la suite d’élections législatives, et a donc dû « cohabiter » avec un Premier ministre qui lui était politiquement hostile. Pendant ces trois périodes le centre du pouvoir s’est déplacé de l’Elysée à Matignon, le Premier ministre déterminant la politique nationale alors que le président opérait un repli arbitral. Ce cadre de cohabitation a des conséquences majeures sur le rôle et la mise en œuvre des pouvoirs du Premier ministre, tout à la fois acteur politique (I) et acteur juridique (II).
I - Le Premier ministre, acteur politique dans le système de la cohabitation
Dans le contexte cohabitationniste le Premier ministre – acteur politique –