Le théâtre doit-il être lu ou vu ?
Sujet : « Le théâtre est fait pour être lu, non pour être vu » (La ville dont le prince est un enfant)
« Le théâtre n'est fait que pour être vu » ; voilà comment Molière lui-même tranchait la question que notre sujet tend à poser. Difficile ici de ne pas faire le rapport avec le constat antithétique que dresse Montherlant dans sa préface, tant la tournure est proche et le sens à l'antipode : « Le théâtre est fait pour être lu, non pour être vu ». Comment expliquer alors une telle évolution dans le rapport des deux dramaturges au genre théâtral ? Entre le 17ème siècle de l'auteur des « précieuses ridicules » et le 20ème, où écrit Montherlant, c'est assurément tout un monde qui diffère. Sur le plan politique d'abord - les pressions imposées à la création artistique n'ont rien de comparable - mais aussi sur un plan esthétique, et peut être encore plus sur celui de la diversité du lectorat potentiel et sur la fragmentation des courants de pensée. Le théâtre populaire, engagé, absurde, le Nouveau Théâtre, le théâtre expressionniste, ce sont là autant d'approches différentes du genre contemporaine de Montherlant ; on comprend mieux dès lors qu'un tel jugement, comme d'ailleurs celui de Molière, tienne plus du rapport qu'entretient l'auteur avec son époque que d'un jugement absolu et transgressif. Shakespeare ne comparait-il pas dans Hamlet le théâtre à un miroir de la nature ? Si tel est le cas c'est alors aussi le prisme d'une époque donnée qui se regarde elle-même. Pourtant, et puisque le sujet nous impose de dépasser les subjectivités historiques, n'y a-t-il pas dans la phrase de Montherlant le germe d'une idée presque dangereuse pour le théâtre ? Ne risque-t-on pas en disant cela de rapprocher le genre théâtral des autres genres littéraires et de l'y confondre ? Voir d'y perde toute sa singularité ? De l'antiquité jusqu'à nos jours le théâtre a pris des formes bien diverses, de la tragédie aux mistères médiévaux, en passant même par la