Le verger dans cligès
Tableau comparatif des principales différences entre les deux versions de Cligès Cligès de Chrétien de Troyes | Cligès en prose | Pas d’épanchement lyrique | Epanchement lyrique important | Vergier de plaisance | Rime entre vergier et esbanoier (v. 6349-50) | Entrée par une porte secrète ( merveilleux) | Pas d’entrée spécifique mentionnée ( évacuation du merveilleux) | Loge sous l’ente aménagée par des branches cassées ( stérilité) | Loge naturelle (une « ente », arbre qui porte des fruits) | Amour érotique et physique (« si a fet soz l’ante son lit / la sont a joie et a delit », vv. 6401-6402) | Amour chaste (« se coucent acolans et baisans ») | Poire (avec la symbolique érotique) | - | Nu a nu (v. 6433) | - | Cri et panique de Fénice | Honte et maîtrise des émotions | Alix empereur légitime (« sire » v. 6539) | Alix imposteur (« toy, l’empereur sans droit et sans raison ») | Fin moralisatrice (impératrices enfermées) | Fin heureuse et non moralisatrice |
Problématique
Dans la littérature médiévale, le verger ou jardin – les deux termes sont alors synonymes – fait office de locus amoenus. Ce lieu commun de la littérature occidentale remonte à l’Antiquité grecque et à la Bible elle-même, si l’on songe à l’évocation du jardin d’Eden et au Cantique des Cantiques. Dans ce dernier, le lieu de nature idéal devient le symbole même de la femme aimée. Elle y est désignée comme hortus conclusus, un lieu qui, associé à la Vierge, deviendra une image du paradis dans l’art médiéval ; dans le contexte courtois, c’est le lieu par excellence où l’amant rencontre la dame, loin du regard de la société, dans une espace qui leur garantit une certaine intimité.
Nous verrons dans cette analyse dans quelle mesure le verger ne sert-il pas à poser une interrogation sur celui-ci. En questionnant le Cligès de Chrétien de Troyes, puis sa mise en prose au XVe