Lecture Analytique Agrippa d'Aubigné
Engagé auprès du roi Henri de Navarre à la Cour, Agrippa d’Aubigné n’hésite pas à s’éloigner de lui quand celui-ci abjure sa foi protestante pour devenir roi de France en 1584. C’est dire à quel point l’auteur des Tragiques, poète protestant, est un homme d’engagement. L’extrait de son œuvre majeure, Les Tragiques, proposé à notre analyse ici, dépeint les malheurs des populations civiles pendant les guerres de religion. L’auteur va se mettre du côté des victimes innocentes pour critiquer la guerre. Nous pourrons nous demander de ce fait en quoi on peut parler ici d’un texte engagé. C’est ce que nous nous attacherons à montrer en faisant apparaître pour commencer une double énonciation qui permet un double regard critique sur la guerre, puis en donnant à voir un spectacle pitoyable, enfin en rendant compte de la critique des guerres exprimée par le poète lui-même.I- Une double énonciation1- L’observateur-témoin- D’emblée, le narrateur apparaît au début de son discours par le verbe au passé " J’ai vu ".- La perception visuelle est relayée par le sens auditif au v.11 " j’ouïs ".- Ce narrateur fait partie d’un groupe, ce que laissent à penser les marques du pluriel objet au v.4 ou sujet au v.6 à l’initiale du vers, dans un effet de mise en valeur. Pronom sujet pluriel relayé par l’utilisation du " on " au v.8 qui souligne l’appartenance du narrateur à un groupe- témoins pour mieux valider la scène à laquelle il a assisté.2- Le personnage- victime- Mais un autre " je " prend le relais du premier à partir du v.18 pour raconter ses malheurs et pour implorer l’aide de son interlocuteur- témoin - Lui aussi appartient à un groupe, celui de sa famille décimée " ma femme ", " nos enfants " qu’il a perdus brutalement.3- La réunion des deux- Le texte fait la part belle aux deux personnages dans une répartition équilibrée de l’énonciation : le narrateur- témoin occupant la 1ère partie du texte (v.1-17) tandis que le narrateur- victime