Les caprices de marianne
OCTAVE. - Comment se porte, mon bon Monsieur, cette gracieuse mélancolie ?COELIO. - Octave ! ô fou que tu es ! tu as un pied de rouge sur les joues ! - D'où te vient cet accoutrement ? N'as-tu pas de honte en plein jour ?
OCTAVE. - O Coelio ! fou que tu es ! tu as un pied de blanc sur les joues !
D'où te vient ce large habit noir ? N'as-tu pas de honte en plein carnaval ?COELIO. - Quelle vie que la tienne ! Ou tu es gris, ou je le suis moi-même.
OCTAVE. - Ou tu es amoureux, ou je le suis moi-même.COELIO. - Plus que jamais de la belle Marianne.OCTAVE. - Plus que jamais de vin de Chypre.COELIO. - J'allais chez toi quand je t'ai rencontré.OCTAVE. - Et moi aussi j'allais chez moi. Comment se porte ma maison ? il y a huit jours que je ne l'ai vue
COELIO. - J'ai un service à te demander.OCTAVE. - Parle, Coelio, mon cher enfant. Veux-tu de l'argent ? Je n'en ai plus. Veux-tu des conseils ? Je suis ivre. veux-tu mon épée ? voilà une batte d'arlequin. Parle, parle, dispose de moi.COELIO. - Combien de temps cela durera-t-il ? Huit jours hors de chez toi ! Tu te tueras, Octave.OCTAVE. - Jamais de ma propre main, mon ami, jamais; j'aimerais mieux mourir que d'attenter à mes jours.COELIO. - Et n'est-ce pas un suicide comme un autre que la vie que tu mènes ?OCTAVE. - Figure-toi un danseur de corde, en brodequins d'argent, le balancier au poing, suspendu entre le ciel et la terre ; à droite et à gauche, de vieilles petites figures racornies, de maigres et pâles fantômes, des créanciers agiles, des parents et des courtisans ; toute une légion de monstres se suspendent à son manteau et le tiraillent de tous côtés pour lui faire perdre l'équilibre ; des phrases redondantes, de grands mots enchâssés cavalcadent autour de lui ; une nuée de prédictions sinistres l'aveugle de ses ailes noires. il continue sa course légère de l'orient à l'occident. S'il regarde en bas, la tête lui tourne ; s'il regarde en haut, le pied lui manque. Il va plus vite que le