Les faits religieux
RAPPORT
À Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale
“ L’enseignement du fait religieux dans l’École laïque ”.
RÉGIS DEBRAY
Février 2002
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Plan général
I. II. III. IV. V.
Quels attendus ? Quelles résistances ? Quelles contraintes ? Quelle laïcité ? Quelles recommandations ?
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I
Quels attendus ?
Apparent consensus. L’opinion française, dans sa majorité, approuve l’idée de renforcer l’étude du religieux dans l’École publique. Et pas seulement pour cause d’actualité traumatisante ou de mode intellectuelle. Dès les années 1980-1990, débouchant sur le rapport du recteur Joutard de 1989, les raisons de fond ont été maintes fois et sous divers angles développées qui militent, en profondeur, pour une approche raisonnée des religions comme faits de civilisation. Argumentaire connu. C’est la menace de plus en plus sensible d’une déshérence collective, d’une rupture des chaînons de la mémoire nationale et européenne où le maillon manquant de l’information religieuse rend strictement incompréhensibles, voire sans intérêt, les tympans de Chartres, la Crucifixion du Tintoret, le Don Juan de Mozart, le Booz endormi de Victor Hugo, et la Semaine Sainte d’Aragon. C’est l’aplatissement, l’affadissement du quotidien environnant dès lors que la Trinité n’est plus qu’une station de métro, les jours fériés, les vacances de Pentecôte et l’année sabbatique, un hasard du calendrier. C’est l’angoisse d’un démembrement communautaire des solidarités civiques, auquel ne contribue pas peu l’ignorance où nous sommes du passé et des croyances de l’autre, grosse de clichés et de préjugés. C’est la recherche, à travers l’universalité du sacré avec ses interdits et ses permissions, d’un fonds de valeurs fédératrices, pour relayer en
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amont l’éducation civique et tempérer l’éclatement des repères comme la diversité, sans précédent pour nous, des appartenances religieuses dans un pays d’immigration