"Les villes et les bourgs me sont si odieux", ronsard, commentaire
Les villes et les bourgs me sont si odieux,
Que je meurs si je vois quelque tracette humaine;
Seulet dedans les bois, pensif je me promène,
Et rien ne m’est plaisant que les sauvages lieux.
Il n’y a dans ces bois sangliers si furieux,
Ni roc si endurci, ni ruisseau, ni fontaine,
Ni arbre tant soit sourd qui ne sache ma peine,
Et qui ne soit marri de mon mal ennuyeux.
Un penser qui renaît d’un autre, m’accompaigne
Avec un pleur amer qui tout le sein me baigne,
Travaillé de soupirs qui compagnons me sont;
Si bien que si quelqu’un me trouvait au bocage,
Voyant mon poil rebours et l’horreur e mon front,
Ne me dirait pas homme, ains un monstre sauvage.
(ains: mais bien au contraire)
En avril 1555 Ronsard s’éprend véritablement d’une modeste paysanne de Bourgueil, Marie Dupin. Abandonnant l’altière image de Cassandre et les complications pétrarquistes, il lui dédie des poèmes simples et clairs en des termes plus naturels. Ce sonnet écrit en 1556 se place dans la nouvelle continuation des amours et décrit l’amant délaissé en proie à la mélancolie. Il recherche dès lors les charmes de la nature, endroit où il peut être dans la confidence et l’apaisement.
Depuis l’Antiquité, surtout dans les éloges et les bucoliques, l’amoureux souffrant recherche la solitude dans la nature qui saura être à l’écoute de ses douleurs. La pléiade développera avec une intensité particulière ce besoin d’épanchement dans la nature, et avec insistance les souffrances de l’amour, les contradictions qui déchirent l’amoureux et l’idéalisation de la femme aimée.
Dans un premier axe, nous nous attarderons sur le lyrisme des sentiment amoureux douloureux du poète, pour ensuite aborder dans un deuxième axe la recherche des lieux sauvages, essentiel à l’assouplissement des maux de ce dernier.
I- l’expression d’une sentiment amoureux douloureux.
L’expression d’un sentiment amoureux douloureux se manifeste par le