mathilda
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A trois ans, Matilda avait appris toute seule à lire en s’exerçant avec les journaux et les magazines qui traînaient à la maison. A quatre ans, elle lisait couramment et, tout naturellement, se mit à rêver de livres. Le seul disponible dans ce foyer de haute culture, La cuisine pour tous, appartenait à sa mère et, lorsqu’elle l’eut épluché de la première page à la dernière et appris toutes les recettes par cœur, elle décida de se lancer dans des lectures plus intéressantes.
- Papa, dit-elle, tu crois que tu pourrais m’acheter un livre ?
- Un livre ? dit-il. Qu’est-ce que tu veux faire d’un livre, pétard de sort !
- Le lire, papa.
- Et la télé, ça te suffit pas ? Vingt dieux ! On a une belle télé avec un écran de 56, et toi tu réclames des bouquins ! Tu as tout de l’enfant gâtée, ma fille.
Presque chaque après-midi, Matilda se trouvait seule à la maison. Son frère (de cinq ans son aîné) allait en classe. Son père était à son travail et sa mère partait jouer au loto dans une ville située à une dizaine kilomètres de là. Mme Verdebois était une mordue du loto et y jouait cinq après-midi par semaine. Ce jour-là, comme son père avait refusé de lui acheter un livre, Matilda décida de se rendre toute seule à la bibliothèque du village. Quand elle arriva, elle se présenta à la bibliothécaire, Mme Folyot. Puis elle demanda si elle pouvait s’asseoir et lire un livre. Mme Folyot, déconcertée par l’apparition d’une si petite visiteuse non accompagnée, l’accueillit néanmoins avec bienveillance.
- Où sont les livres d’enfants, s’il vous plaît ? demanda Matilda.
- Là-bas, sur les rayons du dessous, lui dit Mme Folyot. Veux-tu que je t’aide à en trouver un joli avec beaucoup d’images ?
- Non, merci, dit Matilda, je me débrouillerai bien toute seule.
A dater de ce jour-là, chaque après-midi, aussitôt sa mère partie pour aller jouer au loto, Matilda trottinait jusqu’à la bibliothèque. Il n’y avait