Oeuvre de marguerite yourcenar
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Parmi les productions littéraires du tout proche XXe siècle, l’œuvre de Marguerite Yourcenar brille par son penchant marqué pour les temps révolus, les civilisations éloignées, et leurs pensées, oubliées ou méconnues. C’est une œuvre qui renoue dans Alexis avec le « récit à la française », remis au goût du jour par Gide ; une œuvre écrite d’un style net et indéniablement élégant – Yourcenar parle elle-même d’une « oratio togata » pour Mémoires d’Hadrien1 –. Au vu de tels traits caractéristiques, c’est une œuvre qui apparaît comme s’inscrivant dans un certain classicisme ; en ce sens, nous entendons qu’elle est en accord avec les exigences classiques de mesure, d’équilibre, et qu’elle se trouve aussi teintée d’un relatif intellectualisme. Mais dans cette œuvre cultivant le spirituel, le méditatif, et parfois le sentencieux, une place – et certes non négligeable – est faite à un élément qu’on n’aurait pas attendu : le corps. En effet, Hadrien ouvre ses Mémoires par une douloureuse réflexion sur le corps ; Zénon, médecin, s’est voué à la connaissance de cette machine si sophistiquée ; l’orientalisme des Nouvelles ou de Conte bleu fait une place de tout premier plan au sensoriel, au sensuel, à l’apparence physique ; et les attachements qu’y contractent les êtres de fiction s’ébauchent avant tout sur le mode charnel. Ainsi le corps, loin d’être nié ou méprisé dans ce monde fictionnel pétri d’esprit, se trouve investi d’une importance singulière. Sylvain Garlaschi, dans son étude du réel chez Yourcenar, montre que dans une perspective d’appréhension plus globale du réel, cet auteur met en œuvre une revalorisation de l’imaginaire et du sensible, deux domaines ordinairement déconsidérés comme subalternes et vecteurs d’illusion. Il s’agit de mettre à bas les visions dualistes par trop simplistes et les dichotomies rudimentaires pour expérimenter en fiction ce que le corps nous dit de l’Etre de l’Homme, de l’Etre du Tout. Notre hypothèse est donc que dans l’œuvre romanesque