Pères
Il en est des pères comme de la classe ouvrière, invisibles, voire muets, ils n’en demeurent pas moins les réels des complexes familiaux et des rapports sociaux.
Souvent détruits, marginalisés, exploités, épuisés, en perte d’identités, ils continuent à produire les valeurs d’usages, d’échange, les valeurs morales. On ne les voit pas, on ne les entend guère dans l’orgie médiatique. Ils sont là debout, ils veillent, sentinelles de la nuit.
L’attaque a été frontale, violente, inhumaine, générale et sans appel. La classe ouvrière et le père sont finis, morts, anéantis, du même geste, du même mépris, de la même violence insolente, on a voulu en faire des débris de l’histoire, à la schlague de l’imaginaire, à coups de fouets.
Ils résistent. Ils travaillent, se lèvent à pas d’heure, cumulent les emplois, cherchent des issues, produisent les plus-values sans lesquelles il n’y aurait pas ni capital, ni gâchis de tous les surplus. Ce travail est sourd, invisible, il est quotidien, répétitif, lancinant, dans les formes les plus éhontées de l’esclavage contemporain, sous-traitant, intérimaires, précaires, des contrats de deux heures par jour. Il y a une errance ouvrière dans la quête d’emploi qui est pathétique.
Quant au travail concret, il est complètement insu, il n’apparaît que dans sa psychopathologie, sa souffrance, mais jamais dans sa création, sa force, sa vitalité, émergence des subjectivités, réalisation de soi, et des valeurs sociales. La classe ouvrière existe, du mal d’être nommée, elle disparaît à sa propre conscience. Elle existe sans se dire. Ravages.
Lorsque émergent les conflits, le scandale de l’amiante, on voit apparaître sur la scène, ces hommes ravagés, détruits, debouts. Ils meurent jeunes. Ils mènent des luttes peu visibles, peu connues, dans la solitude et l’isolement, conséquents à la disparition du prolétariat comme concept de la lutte des classes.
Tout comme les pères (dont ils sont partie