Psychologie de l'engagement; note de cours
(extraits)
Robert-Vincent Joule :
Professeur des Universités ; Directeur de la formation doctorale de psychologie ; Université de Provence. Introduction
Comment s'y prendre pour changer les mentalités et les comportements des gens ? Si cette question n’est, évidemment pas neuve, son actualité reste brûlante. A cette question qui nous concerne tous, à un titre ou à un autre, la psychologie de l'engagement apporte une réponse originale. Plusieurs décennies de recherche montrent, en effet, que l'on peut influencer autrui, dans ses convictions, ses choix, ses actes, sans avoir à recourir à l'autorité, ni même à la persuasion (cf. Joule et Beauvois, 1998, 2002).
Autorité et persuasion
L'autorité est incontestablement efficace pour peser sur les comportements, tant il est vrai qu'il suffit le plus souvent d'ordonner pour être obéi. Qui douterait, par exemple, que la meilleure façon de réduire les infractions au code de la route est encore de placer un gendarme à tous les carrefours ? Mais l'autorité a ses limites, les comportements obtenus autoritairement ne débouchant pratiquement jamais sur les changements de mentalités qui seraient susceptibles d’en assurer la pérennité. Retirez le gendarme et vous verrez aussitôt les automobilistes retrouver leurs mauvaises habitudes au volant. (…)
Il est donc hasardeux de tabler sur les vertus de l'autorité et de la persuasion lorsque l'on recherche des effets à longs termes ou lorsque l'on souhaite peser efficacement à la fois sur les comportements et sur les idées des gens. C'est la raison pour laquelle nous préférons, pour notre part, tabler sur les stratégies d’ “ engagement ” (cf. Joule, Beauvois, 1998 ; 2002). Plutôt que de contraindre ou de convaincre, il s'agit d'obtenir des actes a priori anodins mais qui n'en ont pas moins pour conséquence d'engager celles ou ceux qui les auront commis à penser et à se comporter par la suite différemment.