RACINE Phedre Acte II Scene 5
Vers 634 - 711
Alors que la mort de son époux semble de plus en plus certaine, Phèdre s’entretient avec Hippolyte dans le but de parler de la succession qui peut s’ouvrir. Cette scène débute donc par une discussion politique entre la reine et son beau-fils mais, petit à petit, par un glissement psychologique lié à la passion, Phèdre en vient à livrer avec horreur ses sentiments personnels : c’est le second aveu de la pièce, l’aveu d’un amour incontrôlé et excessif. Pour étudier cette scène, nous montrerons, dans un premier axe, que Phèdre construit un fantasme puis nous étudierons dans un 2e axe, les notions de fatalité, de monstruosité et de violence.
AXE 1 : LA CONSTRUCTION D’UN FANTASME
Un fantasme est une image qui est associé au désir le plus profond d’un être humain. C’est donc l’image d’Hippolyte qui s’impose dans le discours de Phèdre, à tout moment et à tout propos. Phèdre s’y livre sans aucune censure (le « Oui » qui débute l’extrait est éloquent). Racine développe le thème de l’amour perdu (l’amour pour Thésée) et insensiblement fait dire à Phèdre que ce n’est pas cet amour-ci qui loge dans son cœur. Il y a substitution des images masculines. Les vers 634 – 637 évoquent brièvement Thésée, le héros volage de la légende, et par une rupture syntaxique très forte (l’emploi du « mais » au vers 638) Phèdre en vient inconsciemment à rendre compte de sa passion, donc à substituer H à T. On remarque que Phèdre parle de son époux en termes peu élogieux (on note le verbe déshonorer) alors que l’énumération des adjectifs qui suit montre la séduction morale et physique d’H. Le spectateur est alerté par ce changement d’objet amoureux notamment par l’emploi de deux adjectifs qui conviennent à H et non à T : « farouche » et « jeune ». On remarque aussi que Racine utilise une allitération en f pour signaler l’emprise amoureuse et qu’il marque une opposition forte dans les rimes en créant une dichotomie morale