Responsabilité
Envisager « la notion et le rôle de la faute » en droit français lors d’un séminaire consacré à la « place de la responsabilité objective » semble conduire à placer d’emblée ce sujet sous contrainte. Il n’est que trop aisé de relever, en première approche, combien la faute s’est trouvée et se trouve concurrencée par les formes de responsabilité dites « objectives », entendues comme toutes celles qui ne subordonnent pas l’indemnisation à l’appréciation du comportement personnel du responsable. Tout aussi classiquement, il est loisible d’observer combien cette concurrence a provoqué un phénomène « d’effritement », voire « d’inéluctable déclin » de la responsabilité pour faute, soit parce que le standard comportemental qui s’y attache n’est plus adapté à l’évolution sociale, soit parce le principe même d’un standard devient discutable lorsqu’il s’agit avant tout d’identifier un débiteur d’indemnité1. On en veut pour preuves naturelles l’impossibilité de prendre en charge, sous couvert de la faute, la massification des accidents provoquée par l’avènement de l’ère industrielle, le progrès technologique et le cortège de risques qu’il ne cesse d’engendrer, appelant en réponse une responsabilité individuelle objectivée - à l’instar du champ ouvert par la réinterprétation de l’article 1384 al. 1 du Code civil2 - ou des mécanismes de socialisation de la réparation aux frontières de l’idée même de responsabilité. Cependant, le statut de la faute civile relève plus d’une loi cyclique que d’un affaissement régulier. En contrepoint de ce dernier, c’est plutôt la vigueur nouvelle de la faute que soulignent nombre de commentateurs, évoquant tantôt sa « renaissance », tantôt sa « verdeur » retrouvée, mesurable par une résistance perceptible au sein des régimes de responsabilité de plein droit, voire par la conquête de « nouveaux territoires »3, nés d’une société post-industrielle productive de