Selon vous, l'illusion créée par le théâtre éloigne-t-elle le spectateur de la vérité ou lui permet-elle de s'en rapprocher ?
S'il n'est pas, comme le dit Hugo, « le pays du réel », ne dépasse-t-il pas l'artifice pour viser une authenticité humaine et nous reconduire, par des détours, à ce que Hugo appelle le « vrai » ?
Le théâtre est essentiellement « représentation ». Or « représenter » signifie « remplacer », « tenir lieu de », « figurer » (comme en peinture). Le verbe implique la notion d'illusion. Et, de fait, rien n'est vrai au théâtre. Tout ce qui fait la réalité de notre vie – le lieu, l'espace et le temps, mais aussi la parole – y est transformé. Diderot note : « On se rend au spectacle avec la persuasion que c'est l'imitation d'un événement et non l'événement même qu'on y verra » (Les Bijoux indiscrets).
La mise en scène – avec les ressources de la scénographie – a une matérialité factice, aisément visible.
Le lieu n'est pas le lieu
Au théâtre, le lieu est illusion : le spectateur admet que la scène présente comme réel un lieu en réalité factice et que les deux cents mètres carrés de la scène représentent une forêt dans le deuxième acte de Dom Juan, un champ de bataille dans Cyrano de Bergerac.
Un décor de carton
Victor Hugo, dramaturge lui-même, explique très concrètement : « Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. »
« Toutes les réalités de la