Semiotique
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BRÎNDUŞA GRIGORIU
Universitatea „Al.I. Cuza” Iaşi
L’Exil à l’image de Tristan (et Yseult)
Les Romans de Tristan du XIIème siècle français sont essentiellement des poèmes de séparation. La distance entre Tristan et l’Yseult de ses fantasmes représente, peut-être, le ressort narratif primordial ; mais il y a aussi l’espace qui se creuse entre eux-Mêmes et les Autres, tout aussi déterminant. Unis à jamais par la mémoire collective, les deux amants inscrivent leur existence légendaire dans l’espace de la séparation, du «jeo sanz mei/ moi sanz vus» 1, autrement dit, de l’exil
Spatialement, narration veut dire cheminement. Dans les Tristan que l’on se propose d’étudier – la version de Béroul et celle de Thomas, les deux datant de la deuxième moitié du XIIème siècle – , il s’agit tantôt d’une quête éperdue de l’autre,tantôt d’une fuite ensemble. Estrange cheminement, à appréhender comme la conquête d’une transcendance autrement accueillante: tabouée, mais suprêmement humaine. Dernier (dé)paysement : la Mort.
Exils tristaniens
D’après la plupart des dictionnaires français, l’exil est un concept-carrefour, se situant à l’intersection d’un (non)vouloir individuel, d’une nécessité souvent impersonnelle ou supra-individuelle, et d’un espace conçu en termes de désirabilité/accessibilité.
Il convient de prendre comme point de départ la définition du Grand Larousse encyclopédique, qui assigne à la notion ses significations le plus fréquemment rencontrées : « expulsion hors de sa patrie » ; « séjour pénible, loin d’un lieu ou de personnes regrettées »2. Tristan remplit sans doute ces conditions : il sera effectivement contraint à quitter sa patrie, ou, du moins, l’être qui objective son sentiment d’appartenance symbolique, son sens de la communion ; en plus, son séjour sera effectivement pénible, même feint, car il équivaut à une marginalisation sinon à une exclusion totale de la société.
Il est vrai, d’autre