sganarelle
Sganarelle est le descendant français du zanni Brighella de la Commedia dell'Arte. Son nom, qui vient de l'italien “ sgannare ”, signifie “ dessiller ”, “ ouvrir les yeux ”. Molière a d'ailleurs créé le personnage de Sganarelle, qu'il incarne lui-même sur scène, selon la coutume des comédiens italiens. On le retrouve dans plusieurs de ses pièces, qu'il s'agisse de L'École des maris, Le Mariage forcé, L'Amour médecin ou Le Médecin malgré lui.
Dans Dom Juan ou le Festin de Pierre, il est le valet de Dom Juan et son interlocuteur privilégié. Comme dans la plupart des pièces de la comédie de l'âge classique, le couple maître/valet joue ici un rôle fondamental, et la pièce est structurée autour de leurs oppositions, de leurs confrontations et des dialogues qu'ils échangent. Sganarelle a gardé de nombreux traits du valet italien et en particulier sa poltronnerie et il incarne la voix du peuple par ses discours et ses croyances simples et rassurantes. Son bon sens et sa ruse lui permettent d'affronter son maître avec aplomb, tout en connaissant parfaitement les limites sociales à ne pas dépasser.
Il se fait homme d'esprit, et ne rechigne pas devant l'opportunité de se valoriser par un beau discours sur le tabac ou la médecine lorsque l'occasion s'en présente. Il connaît parfaitement son maître et met régulièrement en garde des tierces personnes sur le danger qu'il représente (Gusman, Elvire, Charlotte et Mathurine). Néanmoins son affection pour Dom Juan est indéniable et il est autant son double que son opposé, son miroir que son juge.
C'est la raison pour laquelle son jeu est ambigu, comme l'ont immédiatement descellé les ennemis de Molière. Ainsi, son ancien protecteur, devenu dévot, le prince de Conti, parle de Sganarelle en ces termes :
Après avoir fait dire toutes les impiétés les plus horribles à un athée qui a beaucoup d'esprit (Dom Juan), l'auteur confie la cause de Dieu à un valet, à qui il fait dire, pour la soutenir, toutes les impertinences