stratégie militaire
Lorsque que le terme de stratégie est né au xviiie siècle sous la plume de Joly de Maizeroy(1), il qualifiait alors la façon la plus haute de penser et de conduire la guerre. La stratégie se distinguait essentiellement de la tactique par une méthode de pensée différente. Conçue comme un art de combiner « les temps, les lieux, les moyens », la stratégie relevait d’un raisonnement qui intègre, dit Maizeroy, « presque toutes les connaissances humaines ».
Si la stratégie est considérée comme la plus haute partie de la guerre, elle ne représente donc qu’une partie d’un phénomène plus vaste. Il a fallu l’expérience de la première guerre mondiale, la mise en oeuvre puis la théorisation de la guerre totale pour qu’émerge l’idée d’une stratégie globale à laquelle participeraient des composantes non militaires. Et c’est dans les années 1950 que se réalise conceptuellement l’inversion des rapports entre guerre et stratégie :
La guerre constitue un moyen parmi d’autres à la disposition d’un État pour agir sur la volonté d’un autre État. La violence représente un des instruments entre les mains du politique pour réaliser ses projets face à une entité résistante, parmi un spectre d’actions psychologiques et physiques qui s’étend des différents registres de séduction et de persuasion (comme la captation idéologique), jusqu’à l’intimidation et à la coercition. La stratégie, née du champ de bataille, est devenue, selon l’expression de Jean-Paul Charnay, l’art de la contrainte et de la suscitation.
Dès lors s’impose l’idée qu’il existe à côté de la stratégie militaire d’autres formes de stratégie, mettant en oeuvre des moyens économiques et culturels, ainsi qu’une stratégie englobante capable d’articuler l’ensemble de ces moyens à l’interface entre le domaine du projet politique et celui de son exécution. Cette stratégie globale surplombe des stratégies générales qui elles-mêmes contiennent plusieurs stratégies. Ainsi, la stratégie