Tsongor
On retrouve ici la plume incantatoire de Laurent Gaudé qui lie le vivant et le mort, fait parler ses personnages de l'au_delà. Comme Alexandre le Grand, le roi Tsongor est à la fois généreux et guerrier, impîtoyable. La guerre est inscrite en lui et son empire a été bati sur le sang. Le lecteur est immédiatement plongé dans un monde qu'il connait mal, fait d'honneur et de rituels qui portent les hommes autant que les âmes. Le mythe tient une large place et l'on repensera à Troie assiégée, aux guerres déclenchées pour une femme...
Rapidement on comprend que le suicide de Tsongor était une erreur et qu'en fait de solution il ne lègue à sa famille que le malheur. Sa fille Samilia porte justement ce fardeau et sera comdamnée à l'errance alors même que le marcheur, Souba, sera la main de la délivrance pour son père mais non pour le peuple.
Certaines pages sont insoutenables de cruauté, comme cet épisode où Arkalas massacre Bandiagara comme la bête qu'il est devenu. La folie s'empare des hommes comme souvent dans les romans de Laurent Gaudé, mais elle touche ici au néant si bien que nulle autre solution ne s'offre aux hommes que d'aller au bout de la guerre, aussi absurde soit-elle. Je me suis demandé si ce n'était pas aussi un roman sur l'absurde justement. Car cela part d'un geste qui se voulait régulateur mais dérive rapidement dans l'horreur. Au final le lecteur ne trouve que ruines et se demande : pourquoi ? Quelle leçon tirer de ce massacre ? Et qui tirera cette leçon ?