L’éternel Ubu
Acte V, scène IV

Cette scène succède à la fuite d’Ubu. Il s’agit d’un acte essentiel de la structure de la pièce, puisqu’il permet non seulement de montrer le grotesque du personnage lorsqu’il est en danger, mais surtout parce qu’il participe à sa survie et assure ainsi un retour infini du cycle d’Ubu. Elle est d’autant plus importante qu’Ubu, ayant subi l’action à partir de l’acte IV, tente à nouveau de se l’approprier face au commandant du navire et de la déterminer. L’intrigue aboutit dans Ubu enchaîné, car dans cette pièce, le héros, après s’être soumis à la décision du commandant de diriger le navire, s’engage à servir la société comme esclave. Nous pouvons donc percevoir l’évolution de l’action au sein de cette scène qui se prolonge dans Ubu enchaîné.
Le mouvement de la scène est donc assuré par le déroulement de l’action, mais surtout par l’évolution des temps verbaux. Sous ces deux aspects, on peut distinguer quatre parties. La première expose la situation finale des personnages (l. 1-7), c’est pourquoi le présent domine cette partie : « il est de fait que nous filons » (l. 2).
L’originalité de la scène, par rapport au théâtre classique, apparaît dans la seconde partie (L. 8-43), puisqu’au lieu d’assister à l’achèvement de l’action, on assiste à un rebondissement de cette dernière au travers d’une didascalie externe : « Une risée arrive, le navire couche et blanchit la mer » (l.8). L’action de cette scène étant indépendante de celle de la pièce, on peut qualifier l’arrivée de la tempête comme une péripétie, puisque c’est un évènement inattendu qui modifie le caractère psychologique de certains personnages. En effet, à partir de cet évènement, Ubu tente de s’approprier le commandement du navire : « Je vais commander, moi » (l. 23). Dans cette partie, qui peut être considérée comme le nœud de la scène, on peut percevoir l’évolution de l’action par le recours à divers temps verbaux. Le futur reflète la peur d’Ubu face au danger : « Il