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Michel Murat
Vous avez développé au fil de vos livres une écriture très particulière. Quelle représentation vous faites-vous de votre style ? Par quelles caractéristiques pourriez-vous le qualifier ? Comment le situez-vous dans le paysage littéraire actuel ? Avez-vous la conscience d’appartenir, sous ce rapport, à un courant littéraire ?
Laurent Mauvignier
Cette idée que mon écriture serait “très particulière”, je ne l’éprouve pas. Elle m’est au contraire tellement naturelle, je m’y sens tellement à l’aise, que mon problème serait plutôt de ne pas la laisser dominer mon exercice de la littérature, mais de la contraindre pour lui faire ouvrir d’autres voies que celles par lesquelles elle est déjà passée. Quant à “mon style”, s’il faut parler ainsi, je dois reconnaître que j’ai du mal à le percevoir en tant que tel, à lui trouver des singularités identifiables immédiatement.
Je ne force pas, je me laisse couler dans une sonorité, une rythmique, une machine à produire des images et des sensations, des idées et des histoires, des personnages et des actions.
Je ne me définis pas par rapport à un courant littéraire, mais je reconnais dans mon travail des sources, une sorte de “patrimoine génétique” qui traverse mon écriture.
Des caractéristiques stylistiques comme l’hypotaxe, je sais que Balzac ou Proust n’y sont pas pour rien ; qu’il y a une ligne souterraine, comme serait la basse en musique, qui irait chercher chez Faulkner et Claude Simon (les participes présents et les adverbes par exemple) ; une poussée, une fuite en avant, en roue libre, qui viendrait de chez Thomas Bernhard, oui, je ne peux pas l’ignorer. Comme je ne peux pas ignorer le Nouveau Roman, les écrivains de la voix, les textes de Koltès, Duras, Sarraute, et, plus avant, bien sûr, Céline et Joyce. Pour autant, je sais que si mes romans sont écrits avec des techniques modernistes, ils tiennent aussi du