L'amitié selon michel de montaigne
L’amitié ne supporte aucun intérêt qui dans le temps interfèrerait le rapport amical. L’amitié pour Montaigne est aussi plus qu’un concours de circonstances, ou une association décidée et profitant à chacun. Elle a un caractère nécessaire, même si la rencontre est peut-être de nature contingente. L’amitié profonde et sincère ne peut pas ne pas être dès lors que ceux qui deviendront amis se sont rencontrés. Il y a du destin dans l’amitié de Montaigne, à la différence d’une relation familière qui est un engagement réciproque de volontés s’accordant : « Au demeurant ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ce ne sont que des relations familières nouées par quelques circonstances ou quelque utilité, par le moyen de laquelle nos âmes se tiennent unies. Dans l’amitié dont je parle, elles s’unissent et se fondent l’une en l’autre dans une union si totale qu’elles effacent la couture qui les a jointes et ne la retrouvent plus. Si l’on me demande avec insistance de dire pourquoi je l’aimais, je sens que cela ne peut s’exprimer qu’en répondant : « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Il y au-delà de tout mon exposé et de ce que je puis en dire particulièrement des raisons de cette amitié, je ne sais quelle force inexplicable qui vient du destin et qui est la médiatrice de cette union ». « Parce que c’était lui, parce que c’était moi »,
…voilà chez Montaigne un aveu d’impuissance. Son ami et lui, en se trouvant, n’ont plus eu d’autre choix que de se fréquenter dans une relation les engageant chacun entièrement. Il y a pour Montaigne une force, même si elle est inexplicable et ainsi il s’en remet au Ciel, qui justifie cette union nécessaire. A cela, Montaigne ajoute que cette amitié là est absolue, car elle ne peut dépendre de rien que d’elle-même, ni être comparée à quoique ce soit d’autre. Tout juste peut-il la décrire en l’ayant vécue et nous préciser ce qu’elle demande à l’un et à l’autre, soit un abandon de soi