La Russie du XIXème siècle est l'héritière d'une longue tradition autocratique. Composée d'une mosaïque de peuples et en constante expansion, depuis l'Europe centrale, de Kiev jusqu'à l'Alaska, l'immensité du territoire et la permanence de structures sociales archaïques font de la Russie une nation hétéroclite très différente de l'Europe occidentale et des États-Unis d'Amérique. Alors que les révolutions éclatent un peu partout en Europe lors de la première moitié du XIXème siècle, l'Empire russe demeure le symbole de l'absolutisme et le champion de la réaction : le tsar Nicolas Ier – qui règne de 1825 à 1855 et dont la politique est résumée en 1833 en trois mots par son ministre Sergueï Ouvarov : «Autocratie, Orthodoxie, Nationalité» - est même surnommé « le gendarme de l'Europe » à cause de son énergie à défendre les monarchies contre les révolutions qui explosent à l'Ouest (comme en Autriche en 1849). Cependant, les tensions sociales et l'arrivée au pouvoir d'Alexandre II le 3 mars 1855 annoncent la volonté de réformer en profondeur le pays, arriéré politiquement et socialement, éloigné des centres de civilisations de l'Empire Ottoman et de l'Europe Occidentale et en retard du point de vue économique avec la Révolution industrielle presque niée par les tendances réactionnaires. Dès lors, quels sont les caractéristiques de la politique russe du XIXème siècle ? Comment s'amorce son évolution politique, économique, sociale et se définit son échec, ponctué par la révolution de 1905 ? Par conséquent, nous nous pencherons en premier lieu sur les différents aspects du régime autocratique de la Russie, entre autorité et conservatisme, ensuite sur la tentative de réformisation d'Alexandre II qui faillit mener la Russie vers la modernité, et enfin sur les raisons de son échec et ses conséquences : l'explosion de 1905.

I. La Russie des Tsars, un régime autocratique

Seul vrai régime autocratique de l'histoire, la