L'hystérie
Patrick Salvain
« On pourrait presque dire qu'une hystérie est une œuvre d'art déformée »(1) (déformée en ce qu'il s'agirait d'une formation «asociale»). Déjà Freud est sur scène, impliqué et néanmoins masque', en retrait du regard de l'autre : en une position-limite, donc, alors que la méthode cathartique a accouché de la psychanalyse. Écartés les appareils, les massages, les attouchements à la tête, le nettoyage par la suggestion, et peut-être même en un sens jusqu'au ramonage par la parole. Nommée, reconnue, est la scène du transfert, à partir de la rencontre avec les hystériques. D'où cette question : les hystériques auraient-ils, auraient-elles fait une scène à l'analyse? Et si cette dernière est au lieu de l'hystérie, jusqu'à quel point peut-elle obvier à tel verdict de Lacan en 1966 : «Maintenant la psychanalyse a pris la succession de la névrose : elle a la même fonction sociale, mais elle aussi, elle la manque. »(2). D'où notre départ, car si l'hystérie est comme un art manqué, elle n'en défie pas moins l'analyse. Et l'interpelle, peut-être d'un : «Fais voir si t'es une science!». Paroles déplacées, message déformé assurément : soit cela même qui a mis Freud à l'écoute et a tenu son désir en éveil. Jeu de masques, ou bal des sorcières : l'analyse commence, et la vérité de la tromperie nous attend au coin des mots. Et en effet, là où les hystériques prennent les mots au corps et produisent des symptômes polymorphes, Freud devient analyste en prenant les hystériques au mot: il croit à leurs « scènes», comme à la « théorie sexuelle » qu'il en induit - c'est sa sorcière de l'époque. Il est séduit, charmé, ébloui par la version traumatique des hystériques. Puis vient la déception : la réalité de l'événement se dérobe, la « neurotica» ne tient plus. Le symptôme se révèle être piège à savoir, et le réel insaisissable se déplace...
Retour au trauma, pour mémoire Ainsi qu'il l'indique en 1896, le symptôme primaire de